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Gianni Poli

Une idée longue un siècle

Data di pubblicazione su web 08/11/2012
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Il presente saggio ripropone la comunicazione orale presentata al Colloque international pour le centenaire de Jean Vilar. Première partie: La gloire de Jean Vilar (Avignon, 26-27 ottobre 2012). Organizzazione: Université d’Avignon – Université Paris-Sorbonne – Association Jean Vilar-Maison Vilar.

Rapprocher Jean Vilar et Giorgio Strehler sous la devise du Théâtre Populaire et/ou du Théâtre d’Art, pourrait sembler un effort évident, mais pas du tout inutile, afin de reconstituer le développement d’un phénomène qui a traversé longtemps durant l’Europe entière. J’essayerai cette confrontation dans l’espoir de déceler ce que l’idée et l’œuvre de Vilar ont su susciter d’intérêt, d’élan et d’imitation en Italie, au moment de leur première manifestation sur la scène européenne au demeurant des années Quarante-Cinquante du siècle; notamment, dans les choix artistiques et le travail de son collègue cadet.

Une question – pas négligeable à mon avis – se pose ainsi, concernant la priorité de l’idée de théâtre populaire et de son projet; c’est à dire si cela s’est passé d’avance en France ou bien en Italie. Il s’agirait donc d’établir des dates aux événements qui ont conduit nos civilisations à aborder le renouvellement de l’art du théâtre; à partir de l’après-guerre, jusqu’à l’établissement d’Institutions valables et durables, telles le TNP (avec le Festival d’Avignon et les Centres Dramatiques Nationaux)  et le Piccolo Teatro de Milan, devancier des Teatri Stabili italiens. Dans un premier bilan de l’aventure du Piccolo, on peut lire l’assertion de la priorité milanaise de cette entreprise, soit «d’un motif dans lequel plus tard d’autres comédiens et metteurs en scène d’ailleurs, à partir de Jean Vilar, auraient à reconnaître leur mobile: le théâtre service public».[1] Plus tard, le metteur en scène italien rappelle la dévise, reclamée de son debut du Piccolo (avec son co-directeur Paolo Grassi), soit de «service public» : «Bien sûr, nous étions obsédés par l’idée de mettre sur pied un théâtre populaire. J’entretenais des rapports fraternels avec Jean Vilar et Gérard Philipe. [...] Chez Vilar, le concept d’un théâtre national populaire répondait aussi à une necéssité. Vilar s’est retrouvé avec le Théâtre de Chaillot entre les mains, un lieu absolumment incroyable, doté d’une salle et d’une scène gigantesques [...] et Vilar decida alors d’utiliser et de théoriser ce moyen».[2]

Pour mieux évoquer ce moment historique, il faudrait rappeler ce qui se passait en France et en Italie sur l’élan de la décentralisation; ou bien à propos du répertoire qui, notamment en Italie, avait été soumis à la censure fasciste; et encore, à propos des voies adoptées dans la mise en scène, qui à l’époque n’était pas sufisamment développée et reçue chez nos artistes. Je ferai donc recours aux documents concernant la naissance de ce mouvement qui a vu réunies dans un même effort, l’action, la passion et les ideaux de deux figures immenses de directeurs et metteurs en scène, soit de Jean Vilar et Giorgio Strehler. Je me dois aussi de noter que leurs carrières ont été très différentes, si l’on considère la briéveté de celle de Vilar (25 ans environ) par rapport à celle bien longue de l’Italien. «Strehler l’artiste est plus que centenaire»,[3] affirmait Bernard Dort.

Au moment de rendre hommage à Vilar dans la revue «L’Herne», consacré à l’artiste disparu vingt ans avant, Strehler y donnait sa contribution sous le titre Un rêve partagé.[4] C’est pourtant sous la définition du confrère survécu, que j’irai poursuivre ma reconstitution de cette aventure passionnante et qui a si longtemps duré. Si l’on observe la situation italienne aux années Quarante, l’on y trouve une ferveur particulière, une insouciance aiguë et aussi une volonté ferme, visant déjà au changement de l’organisation théâtrale nationale. Le 8 août 1943, paraît à Rome l’article Per un teatro del popolo, signé par Orazio Costa, Diego Fabbri, Gerardo Guerrieri, Vito Pandolfi et Tullio Pinelli. Dans ce Manifeste-là on lisait notamment:

«Per questo noi auspichiamo :

- che la Nazione consideri il teatro come un luogo in cui il popolo conviene per un’opera di elevazione spirituale e, come per la scuola, ne promuova lo sviluppo;

- che il popolo autentico possa accedere al teatro attraverso una organizzazione veramente popolare per ciò che riguarda i prezzi e l’uniformità dei posti;

- che nella scelta degli uomini che dovranno dirigere i teatri si adotti il criterio della capacità artistica e non della forza economica».[5]

Paolo Grassi, en tant que critique de l’«Avanti!», venait lui aussi d’impliquer le peuple dans un rapport renouvelé: «Il popolo dei ceti medi, degli operai, dei contadini, degli artigiani, degli intellettuali riconoscerà nel teatro di Wedekind e di Saroyan, di Brecht e di Toller, di Werfel e di Sternheim […] i motivi che lo hanno portato alla lotta contro la borghesia capitalistica».[6]

Lui-même, aurait dénoncé ensuite son pessimisme quant à l’éfficacité «révolutionnaire» du théâtre, tout en demeurant fidel à une action et à une organisation «possibilistes» de l’Art: «Il nostro compito di teatranti è quello di tenere in vita come meglio è possibile il teatro, per consegnarlo a generazioni più di noi fortunate».[7]

La période montre un débat animé par un élan de participation qui rassemble les communistes,  les socialistes et les catholiques, dans une réalité en transformation. Dans telle situation, il faut mieux se concentrer sur la collaboration entre Giorgio Strehler et Paolo Grassi, dont l’effort aboutira à l’inauguration du Piccolo Teatro de Milan en mai 1947, avec la mise en scène de Les Bas-Fonds de Maxime Gorki, suivi de Les nuits de la colère d’Armand Salacrou et de Arlequin serviteur de deux maîtres, de Goldoni: programme qui marie art et passion civile et qui est consacré «agli spettatori di domani, cui chiediamo di aprirsi a immagini di vita umana ora dolorosa, ora redenta […] a tutti i cittadini milanesi, alla cui dignità vogliamo ritorni la bellezza e la bontà di questa nostra fatica».[8]

L’année suivante, le Piccolo est en tournée à Paris, avec Le Corbeau de Carlo Gozzi: d’ores et déjà, Strehler et sa troupe visiteront regulièrement la Capitale française, avec la création de Ce soir on improvise, de Pirandello, au Théâtre des Champs-Elysées en octobre 1949; en suivant avec Six personnages (1953) et L’opéra de quat’ sous, de Brecht (1960) au TNP. Et ce sera aussi interessant de noter les concordances du répertoire choisi par les deux artistes, tel Shakespeare et Eliot, avec Richard II et Meurtre dans la cathédrale (1947-48), et encore Strindberg (L’Orage), Büchner (La mort de Danton), et Dom Juan, de Molière, avant de parvenir à Brecht. Dans l’eclectisme de ses débuts, Strehler n’a pas encore pris sa grand-route.

Qu’est-ce qu’il s’est passé en France avec (et grâce à) Jean Vilar, avant que le retentissement de son travail soit aperçu et reçu en Europe? L’acteur qui a collaboré avec La Roulotte de Clavel et a monté juste des textes de Strindberg et Eliot, devient le Patron d’une troupe et, en discutant de la fonction du responsable du spectacle, va souligner son emploi de “régisseur” plutôt que de metteur en scène.[9]

Entre temps, il a quand même cerné sa vocation. Dans Écrit en 1944, il nous renseigne sur son engagement total, où éthique et raison civique se reflètent en «chant et beauté»:

«Il ne s’agit pas non plus... pour que le théâtre retrouve ses pleines vertus de chant et de beauté. [...] car l’œuvre théâtrale authentique, si elle est à la pointe même de la philosophie de l’homme réclame du public, j’allais dire de son peuple, l’oubli le plus serein des exigences quotidiennes de l’histoire. [...] En bref, il s’agit pour commencer de vouloir bien considérer le théâtre non plus comme une exploitation commerciale, mais comme une religion de l’homme».[10] 

On trouve ici l’écho des instances proposées dans le Programme de quatre fondateurs italiens, pour lesquels le spectacle, conçu selon la nouvelle notion de mise en scène, envisagéait la solidarité des rôles du «poète… du comédien… du spectateur».[11]

Comme l’humanisme semble être le substrat commun aux deux artistes, cette position-là aura par conséquent la contestation double qu’ira bouleverser les programmes de tous les deux, au moment retentissant de mai Soixante huit. C’est juste par rapport aux choix et aux comportements soi disant révolutionnaires, que les deux seront jugés. Humanisme qui se décèle par exemple dans une lettre de Strehler à Ivo Chiesa, où il rend hommage à Copeau (et à Dullin), dont il admire le dévouement. Il affirme là que «la société est à l’avance du théâtre… les feux de la rampe demandent tout un homme»; et il reconnaît un besoin séculaire: «È stata, in questo secolo desolato e travolto, la nascita di un sogno: quello di una collettività teatrale operante nella società per riformarla».[12]

D’ailleurs, on nourrit l’espoir d’un tournant dans l’histoire, concernant les intellectuels et les gens de théâtre, capable de «transformer la patologie des rapports humains en pédagogie», à la manière de Brecht, lors de l’intervention de Gerardo Guerrieri au Colloque de Milan en 1963.[13]

Selon le critique, comme le théâtre de Brecht est «politique», il questionne l’homme et ainsi le problème de l’humanisme s’insère dans une situation où la science va juste remplacer la voie humaniste. Et une question ultérieure va se poser: un humanisme peut être-t-il révolutionnaire? La réponse est non, pour les partisans de Brecht, tout de même pour ceux qui en France, s’en prendront dogmatiquement au choix vilarien.

Jetons un regard sur la demarche precédente de Vilar, soit sur l’organisation de la Semaine d’Art d’Avignon, en été 1947, grâce à laquelle les bases venaient d’être posées du Festival qui aura vu sa véritable éclosion l’année suivante. Richard II de Shakespeare et Tobie et Sarah de Claudel étaient mis à l’affiche pour aimanter le public populaire songé par l’animateur. S’agit-il pourtant d’un véritable publique «populaire»? Cette question, fondamentale du depart, hantera soit le responsable du TNP, soit les directeurs du Piccolo. Vilar reconnaissait, dans son Memorandum, que «dans l’esprit des opposants, le mot populaire signifiait ouvrier; que le théâtre qu’on aurait voulu me voir pratiquer, c’était un théâtre ouvrier».[14] Bernard Dort reviendra, dans son Autothéâtrographie, et sur cette question capitale et sur la querelle correspondante ravivée en Italie.[15]

Les questions de l’engagement politique et de l’interprétation-diffusion de Brecht, passent par la personnalité de Bernard Dort qui a approché, etudié et jugé le modèle du «théâtre populaire» selon la façon de monter le dramaturge allemand de la part de Vilar et de Strehler. On pourrait donc se refaire à la méthode de Dort pour mésurer l’orthodoxie de la démarche «populaire» de deux metteurs en scène à la croisée de leurs chemins artistiques. Rancunes et incompréhensions (semblables à celles qui poussent Strehler à quitter le Piccolo?) poussent le directeur de Chaillot à démissionner, bien avant de subir la contestation éclatante et rude de mai 1968. Pour Strehler, on peu juger avec du récul les mobiles de son abandon du Piccolo en 1968 et de la constitution du Gruppo Teatro e Azione. Au moment de la création de La résistible ascension d’Arturo Ui à Chaillot (1960), le critique, se souvenant de sa décheance pour le résultat de Mère Courage, donnait son adehésion à ce dernier spectacle: «Le cérémonial théâtral du TNP retrouvait une netteté, une gravité, une clarté et un tranchant qui avaient disparu [...]. Il y avait plus: dans Arturo Ui ce cérémonial entreprit sa propre critique».[16]

Quant à Strehler, Dort avoue son prejugé: «L’image de marque du Piccolo était l’italianité ou – mais ceci renvoie à cela – la commedia dell’arte [...] pour nos hommes de théâtre, pour nos critiques, toute pièce italienne est une commedia dell’arte...».[17] Ce serait facile de réfuter ce jugement de surface, tandis que Dort aurait dénoncé cette legende dans Un théâtre exemplaire,[18] en interprétant les positions et  les souhaits que Strehler avançait en 1974, dans une lettre au critique du «Corriere della sera», Roberto de Monticelli:

«Credevamo nella regia come “fatto eminentemente interpretativo”, consideravamo la regia come un ‘fatto critico’. [...]  

1. La regia è un fatto critico. È la “lettura critica”, del testo, attraverso la “forma” dello spettacolo e i suoi mezzi.

2. Se la regia è un fatto critico...

[…] Un testo non è quello che si vorrebbe fosse: “è quello che è”. Scoprire questo “quello che è” è il primo compito del regista…».[19]

Cette méthodologie qu’on a appelée en Italie “regia critica” (mise en scène critique), est à l’origine de tout un renouvellement à l’époque. L’engagement artistique en découle pour Strehler total et absolu, jusqu’à son but esthétique, suspendu entre «folie et objectivité, jusqu’au texte-partition», étant la musique le terme de comparaison pour toute mise en scène valable. Cette sorte d’engagement on le trouve aussi chez Vilar, marqué par l’esprit “civique”, pourtant poursuivi par un formalisme apparemment moins outré. Les premiers écrits de Vilar (recueillis dans De la tradition théâtrale, 1955) et ses refléxions sur l’histoire du théâtre français récent en témoignent. Dans la dramaturgie reçue, il indiquait des défauts inquiétants et il proposait des tournants capitaux: «Il s’agit donc de faire une société, après quoi nous ferons peut-être du bon théâtre», visés à des transformations sociaux et politiques très considérables. «L’art peut et doit intervenir dans l’histoire», est placé en exergue de son Mémorandum de 1960. Strehler, de sa part, en choisissant des textes «nécessaires», est conscient de la responsabilité de son parti pris: «Ces possibilités du théâtre sont très puissantes [...]. C’est vrai que le théâtre peut-il changer le monde ? Bien sûr qu’il il est capable de le changer [...] le théâtre est inseré dans la possibilité de changer le monde, dans l’histoire de l’homme qui change».[20]

Tous les deux accordent le service à la communauté avec l’effort artistique. Ainsi la présence créative dans la société se proposait des buts collectifs ambitieux, même s’ils étaient liés à des racines intimement personnelles. Dans telle perspective extrémiste, l’expérience vilarienne se balance entre «libération» et «expression»; entre passion et beauté. En effet, la conscience aiguisée de l’intellectuel Vilar se battait du debut pour un humanisme pas anachronique, puisqu’il sortait d’un besoin de savoir, en reconnaissance de la reciprocité de la morale, la culture et l’art:

«Dans un État digne de ce mot, politique et théâtre sont un mariage nécessaire […]. Il ne s’agit pas non plus d’accoupler la sagesse profonde d’un art à une politique qui ne peut être que passagère, il s’agit d’exiger de celle-ci qu’elle soit suffisamment conforme aux exigences et aux forces les plus intimes de l’homme et peut-être les plus anarchiques, pour que le théâtre retrouve ses pleines vertues de chant et de beauté».[21]

D’autres analogies, concernant les répertoires, meritent d’être remarquées. Les œuvres de Goldoni et Brecht sont importantes chez Strehler. Si Vilar a devancé l’italien en montant Mère Courage en 1951, ensuite la démarche de Strehler a pris en charge l’interprétation et la diffusion de Brecht en Italie, jusqu’à considérer ses mises en scène des modèles par rapport à la règle brechtienne. Quand même, Vilar  profitera-t-il avec Arturo Ui monté en 1960, d’une réussite comparable à celle de Vie de Galilée, monté par Strehler à Milan en 1963. Parmi les auteurs chéris de l’italien, en ressortent Shakespeare, Goldoni, Pirandello et Tchekhov. Dans sa saison première, El magico prodigioso (1947) de Calderón de la Barca est, selon Meldolesi, «un spectacle vilarien ante litteram».[22]

  

Goldoni, l’un des dramaturges marquants la poétique de Strehler, trouve aussi en Vilar une attention aiguisée, grâce à la fonction de passeur de Mario Baratto, quand il monte Les Rustres en 1961. Pirandello concerne Vilar qui interprète deux fois son Henri IV; Strehler se passionne aux chef-d’œuvres Ce soir on improvise, Six personnages et Les Géants de la montagne, dont il donne des versions successives. Platonov de Tchekhov est choisi par Vilar en 1956, par Strehler en 1959. Shakespeare est le poète qui hante l’imagination de Strehler, avec La tempête, La Mégère apprivoisée, Richard II, Henry IV, Macbeth, Roi Lear. Le Dossier Oppenheimer, de Heinar Kipphardt, est monté par les deux pendant la saison 1964-65. Les classiques français sont à l’affiche du Piccolo, à partir de Molière, Corneille et Marivaux, jusqu’à Genet. Juge Bernard Dort: «Le Piccolo jouit du répertoire théâtral le plus contemporain à ma connaissance… et il dispose des moyens pour nous le communiquer, ceux du réalisme épique».[23]

Un net changement des comportements artistiques est remarquable, suite au changement d’orientation des projets «populaires» du départ. Dans un Colloque des années Soixante, parmi ces mutations, Ruggero Jacobbi relève un certain décalage concernant le populisme marxiste et le répertoire; ainsi que l’événément d’un public qui saurait lui-même suggérer le répertoire est noté par Luigi Ferrante. Et de sa part, Ivo Chiesa, co-directeur du Teatro Stabile de Gênes, de citer la demarche de Roger Planchon, qui a Villeurbanne «expliquait les règles du jeu» à ses spectateurs potentiels, assurant ainsi un agrandissement de son public.[24]

Je faisais allusion au traumatisme de Mai 1968. Du côté italien, nombres d’analyses et de bilans ont accompagné ce bouleversement et on a lu aussi des propos sur la situation française, tel celui de Mario Raimondo. Suite au malheur qui venait de frapper Barrault et Vilar, le critique denonçait une accomodation «jacobine» (signe d’un «inévitable Termidore»), notamment au moyen des Maisons de la Culture, en réaction à ce séisme politique et culturel».[25]

C’est à ce moment-là que le trajet de Stehler marque un tournant, par sa démission du Piccolo et la fondation de son propre groupe. La raison déclarée de son départ: «Per poter sperimentare nuove metodologie di lavoro in un’indipendenza di scelte e di responsabilità non compatibili con un’istituzione pubblica».[26] Reniement soudain du côté et “public” et “populaire”? Et aussi, la crainte d’être mis en procès par les gens de théâtre de la gauche extrème et l’impatience face au manque de pouvoir absolu chez le Piccolo. Et Claudio Longhi de souffler: «À l’heure de quitter rue Rovello, Strehler gardait toutefois prudemment entrouverte la porte».[27] Dans l’été, suite à un échange entre Grassi et Vilar, la presse italienne diffusait des suppositions sur l’évolution du Piccolo: «La structure milanaise va-t-elle se transformer en théâtre national populaire italien?».[28]

À noter, l’intention de Strehler d’établir sa troupe à Prato, sous la dénomination de “Teatro Regionale Popolare” ou bien “Teatro Popolare della Regione Toscana”[29] bien qu’un rôle «national» ait été envisagé par le Piccolo, parmi les Stabili, en analogie au rôle reclamé par le TNP par rapport aux CDN. Plus tard, Siro Ferrone réfléchissant sur les raisons qui poussent Strehler à quitter le Piccolo, les trouve dans le besoin d’autonomie surtout artistique, face à la primauté de Grassi dans l’organisation et la production. Le critique note les divergences à l’égard des buts du «service public» et rappelle la meséntente entre Strehler et Grassi. D’autres critiques au système de géstion des théâtres publics subventionnés se succédent depuis 1965 jusqu’aux années soixante-dix.[30] Et Antonio Attisani (directeur de «Scena»), dans son bilan de 1976, affirme en citant Strehler: «Le rêve de théâtre populaire, tendant à un théâtre d’unité, grand lieu où la collectivité se réunit pour célebrer ensemble […] c’est un rêve qui à un jour donné on a compris qui ne pouvait pas marcher sur ses jambes. Ce rêve-là a vu le coucher du soleil en Italie sans avoir connu non plus les pompes du TNP français ou du système théâtral allemand».[31]     

C’est vrai qu’une métamorphose marque le développement du Piccolo, de la communauté à la collectivité. Ainsi selon l’avis de Dort, «on passe d’une compagnie à un théâtre». Et l’attention de l’artiste porte sur la quantité qui va au détriment de la qualité, en imitant «l’histoire du TNP de Vilar à Chaillot».[32] 

En raison d’une philosophie centrée sur la foi dans la communauté, on obtient une émotion qui permet de dépasser toute impasse technique: ainsi Strehler vise, grâce au travail artisanal de la «bottega» (selon Ferrone) à «une théâtralité méta-historique». La troupe de vedettes et d’inconnus réunie autour de Vilar répond elle aussi à une instance éthique: «Nous sommes donc condamnés, et vous et moi, à élaborer non pas un contrat de travail, mais une morale», déclare le Patron en 1960.[33]

Dans le domaine de l’art de l’acteur, Strehler et Vilar descendent de quelques Maîtres communs, tels Copeau, Dullin et Jouvet. Au départ, avant d’essayer la mise en scène, tous les deux exercent le métier  de comédien. Soutient encore Ferrone pour Strehler: «La tâche de l’acteur c’était de faire surgir la figure […] du personnage-héros, c’est-à-dire de l’éternité»[34]; ce qui est bien valable pour Vilar, qui fait confiance à la collaboration avec l’acteur pour la création du personnage.

Il faudrait ajouter d’autres questions ouvertes et pas abordées jusqu’ici, telles l’exploitation de l’espace scénique (décor) et la fonction des autres éléments de l’aménagement du spectacle, soit la musique, la lumière et les costumes. Giorgio Strehler s’est peut-être montré esthète davantage, face à Jean Vilar, qui faisait semblant de ne pas exalter les détails dans ses mises en scène. En ce qui concerne l’espace scénique, il faut différencier la démarche vilarienne visant à aménager la Cour d’honneur d’Avignon ou bien l’antre de Chaillot : des espaces incommensurables à la dimension si petite de la salle milanaise. Chez le Piccolo, Strehler est toujours concerné par les proportions de la boîte où il va organiser le jeu; boîte à l’italienne, dans laquelle Ezio Frigerio ou Luciano Damiani sont les collaborateurs irremplaçables pour la préparation spatiale et architecturale des spectacles. Quand même, c’est le problème de la continuité entre la scène et la salle qui est résolument abordé par les deux artistes, soit avec des moyens différents (emploi du rideau, de la rampe, etc.). Quant à la musique, il s’agit d’une composante bien remarquable chez les deux. C’est connue la sensibilité  musicale de Vilar, qui participa, avec Pierre Boulez et Maurice Béjart, à la Commission d’étude pour la réforme des Théâtres lyriques en 1967[35]. On se souvient des réussites de la collaboration avec Maurice Jarre, veritable occasion de création sonore et d’environnement suggestif. En metteur en scène d’opéras, il a assuré, notamment en Italie, la direction de Jerusalem, Macbeth et Don Carlos de Verdi; de Les Noces de Figaro de Mozart. De même que Strehler, qui a très tôt abordé l’opéra et qui comptait sur une formation musicale importante: importante jusqu’à mettre en jeu le choix ferme de sa vocation. Son aventure artistique au Piccolo s’est entièrement déroulée et accomplie en compagnonnage avec le musicien Fiorenzo Carpi. Au fil des affinités et des différences juste amorcées ici, pourra-t-on affirmer la fonction de démiurge de la scène de Strehler face à la «royauté démocratique» de Vilar. «Mon métier – avoue Strelher – est celui de raconter des histoires aux autres… Mais ce qui compte pour moi, c’est n’est pas d’être compris. Ce qui me suffit, c’est d’être écouté».[36]

De cela, une sorte de solitude héroique (nommée «martyre» par certains critiques et par Strehler même) colle à l’artiste; car «l’art ou bien le métier de l’acteur c’est le Mystère», ajoute Strehler. Condition qui aurait touché aussi Vilar, à l’avis de Philippa Wehle, puisque dans son «orgueil d’être homme», l’artiste choisit des personnages qui font de l’héroisme et de la solitude leur image et leur dévise.[37]

Les essais d’organisation théâtrale italiens les plus redévables au model du TNP, furent le soi disant ouvrier et classiste “Teatro di massa” de Marcello Saltarelli et le “Gruppo Teatrale Viaggiante” de Luciano Leonesi, qui pour sa Compagnie choisit un insigne (“logo”) tout à fait décalqué de celui dessiné par Marcel Jacno pour le TNP: «Le théâtre c’est un droit – réclamait-il, s’identifiant à Vilar – [...] comme le pain». Juste après, c’est remarquable le TPI de Luciano Lucignani et Vittorio Gassman, qu’avec un répertoire classiquement «populaire» se produisait sous chapiteau.[38]

L’héritage vilarien en France est loin d’être épuisé, comme en témoigne la présence de beaucoup d’artistes et animateurs, depuis Roger Planchon et Antoine Vitez; Jacques Lassalle, Georges Lavaudant et Christian Schiaretti. Quant à Patrice Chéreau, il dénonce ses dettes vers Giorgio Strehler, dont il avait relevé la place à Milan entre 1968 et 1971. Notamment aujourd’hui, le Théâtre du Soleil d’Ariane Mnouchkine est censé d’être le véritable héritier de Copeau et de Vilar. Quant au rayonnement de Vilar en Italie, on remarque la permanence de “petits groupes” de recherche populaire, issus des cooperatives fondées depuis 1968-1970 pour poursuivre et revendiquer le côté «populaire» de leur engagement par rapport au public. Le fruit majeur de l’admiration rendue à Strehler en France, c’est peut-être le Théâtre de l’Europe, fondé à l’Odéon de Paris en 1982-83. D’ailleurs le Piccolo, un «théâtre exemplaire», un «théâtre d’art pour tous», est lui aussi dénommé Théâtre de l’Europe.[39] Mais ceux-ci ne sont plus des rêves, ils sont des réalités avec lesquelles nous mêmes, nous les contemporains, nous avons à faire pour orienter au futur notre nostalgie de passion et de beauté.

Remerciements: Musée-Bibliothèque de l’Acteur, Gênes; Alliance française, Gênes; Fernanda Littardi, Sanremo.



[1] E. Ariosto, 1947-1958 Piccolo Teatro, Milan, Moneta, 1958, p. 9.

[2] Conversation entre Giorgio Strehler et Bernard Dort, dans Giorgio Strehler ou la passion théâtrale (Actes du 3ème Prix Europe pour le théâtre), Catania, Prix Europe, 2007, pp. 126-27. À propos du déclin de l’idée vilarienne en France, Strehler s’exprime dans Io Strehler. Conversazioni con Ugo Ronfani, Milan, Rusconi, 1986, p. 195.

[3] B. Dort, Conversation entre Giorgio Strehler et Bernard Dort, cit., p. 29.

[4] G. Strehler, Un rêve partagé, «L’Herne», 67, 1995, pp. 141-42.

[5] «Pour cette raison nous souhaitons: que la Nation considère le théâtre comme un lieu où le peuple se rend pour une œuvre d’élévation spirituelle et, comme pour l’école, qu'elle puisse en promouvoir le développement ; que le peuple authentique puisse accéder au théâtre à travers une organisation vraiment populaire en ce qui concerne les prix et l’uniformité des places; que pour le choix des hommes qui devront diriger les théâtres on adopte le critère du savoir faire artistique et pas de la force économique» (Parution dans plusieurs journaux de la Capitale. Traduction en français des citations italiennes au soin de l'auteur). Silvio D’Amico aussi venait peu après de souscrire le Manifeste. Cfr. C. Meldolesi, Fondamenti del teatro italiano, Firenze, Sansoni, 1984, p. 126 et R. Tessari, Teatro italiano del Novecento, Firenze, 1996, pp. 77-78. Vito Pandolfi avait déjà publié Per uno spettacolo popolare, «Maestrale», octobre 1942 et écrit Verso uno spettacolo popolare (inédit), cité dans C. Meldolesi, Fondamenti del teatro italiano, cit., p. 123.

[6] «Le peuple des rangs moyens, des ouvriers, des paysans, des artisans, des intellectuels, saura reconnaître dans les œuvres de Wedekind et Saroyan, de Brecht et Toller, Werfel et Sternheim [...] les motifs qui l’ont amené au combat contre la bourgeoisie capitaliste» (P. Grassi, Teatro del popolo, «Avanti!», 30 aprile 1945). 

[7] «Notre devoir d’hommes de théâtre  est celui de garder en vie de la façon la meilleure possible le théâtre, pour le transmettre à des générations plus chanceuses que nous» (P. Grassi, Ancora sul teatro italiano, «Avanti!», 25 agosto 1950). Le critique de théâtre avait rencontré en collègue chez le journal socialiste «Avanti!», Giorgio Napolitano, l’actuel Président de la République.

[8] «Aux spectateurs de demain, auxquels nous demandons de se livrer à des images de la vie humaine tantot douleureuse tantot affranchie [...] à tous les milanais, à la dignité desquels nous désirons redonner la beauté et la bonté de notre fatigue» (P. Grassi, G. Strehler, M. Apollonio, V. Todi, Lettera programmatica per Il Piccolo Teatro della città di Milano, «Il Politecnico», 35, janvier-mars 1947 [cit. dans Tessari, 1996, pp. 83-84]). Cfr. Statut du Piccolo Teatro, dans E. Ariosto, 1947-1958 Piccolo Teatro, cit., p. 257.

[9] Cfr. L. Montillet, Jean Vilar: régie ou mise en scène?, «Revue d’Histoire du Théâtre», 3, 2000, pp. 197-222. Problème d’ailleurs présent dans différentes situations par rapports aux fonctions de la mise en scène: cfr. P. Brook, Il punto in movimento 1946-1987, Milano, Ubulibri, 1997, p. 15.

[10] J. Vilar, Écrit en 1944, «L’Herne», 67, 1955, pp. 21-22.

[11] P. Grassi, G. Strehler, M. Apollonio, V. Todi, Lettera programmatica per Il Piccolo Teatro della città di Milano, cit.

[12] «On a vu, dans ce siècle dévasté et renversé, la naissance d’un rêve : celui d’une collectivité théâtrale qui opère dans la société afin de la réformer» (G. Strehler, A Ivo Chiesa, janvier 1950, Lettere sul teatro, Milano, Archinto,  pp. 19-20). La «foi» vilarienne de Ivo Chiesa est témoignée du fait que la salle du Teatro Genovese à Gênes ait été inaugurée par le Dom Juan de Molière du TNP, le 1er octobre 1955.

[13] G. Guerrieri, Scrittori di teatro, oggi, dans Teatro situazione 1963, Gênes, Teatro Stabile di Genova, 1963, p. 94.

[14] J. Vilar, Mémorandum, «Théâtre populaire», 40, 1960, p. 224.

[15] B. Dort, Autothéâtrographie, dans Les Pouvoirs du Théâtre. Essais pour Bernard Dort, Paris, Éd. Théâtrales, 1994, p. 159. Cfr. J. Vilar, Mémorandum, «Théâtre populaire», 40, 1960. On se souvient la contestation de J.-P. Sartre à l’intention «populaire» vilarienne: cfr. Théâtre populaire, théâtre bourgeois (1953), dans Un Théâtre de situations, Paris, Gallimard, 1992.

[16] B. Dort, Autothéâtrographie, cit., p. 162.

[17]Ivi, p. 163.

[18] B. Dort, «Théâtre populaire», 33, 1959 (trad, it., Teatro Pubblico, Padova, Marsilio).

[19] «Nous croyions dans la mise en scène comme “fait éminemment interprétatif”, nous considérions la mise en scène comme un “fait critique”. […] 1. La mise en scène est un fait critique. C’est la “lecture critique”, du texte, à travers la “forme” du spectacle et de ses moyens. 2. Si la mise en scène est un fait critique… […] Un texte n’est pas ce qu’on voudrait qu’il soit : il est “ce qu’il est”. Déceler ce “ce qu’il est” c’est le premier devoir du metteur en scène…» (G. Strehler, Lettere sul teatro, cit., pp. 69-70).

[20] G. Stampalia, Strehler dirige, Venezia, Marsilio, 1997, p. 30. Cfr. aussi A. Mnouchkine, Le Théâtre est toujours prophétique, cit. dans S. Bottiroli-R. Gandolfi, Un teatro attraversato dal mondo. Il Théâtre du Soleil oggi, Corazzano, Titivillus, 2012, p. 135.

[21] J. Vilar, Écrit en 1944, cit, p. 21. De son côté, Strehler: «L’histoire du Piccolo aurait du se transformer dans l’histoire de cette quête et de cette interprétation des rapports entre l’homme, la société et le théâtre» (G. Strehler, Io Strehler, cit., p. 98). À présent, on retrouve chez Ariane Mnouchkine une utopie semblable.

[22] C. Meldolesi, Fondamenti del teatro italiano, cit., p. 230.

[23] B. Dort, Théâtre populaire, 33, 1959.

[24] I. Chiesa, dans Teatro situazione 1963, cit., p. 126. Dans ce même ouvrage, les avis de Ruggero Jacobbi et Luigi Ferrante.

[25] M. Raimondo, Il Gruppo Teatro e Azione, cit. dans C. Longhi, Marisa Fabbri. Lungo viaggio attraverso il teatro di regia, Firenze, Le Lettere, 2010, p. 172.

[26] «Pour gagner la possibilité de spérimenter de nouveaux méthodes de travail dans une indépendance de choix et de responsabilitées, pas compatibles avec une institution publique» (G. Strehler, Lettere sul teatro, cit., p. 184) et cfr. aussi Manifesto Strehler (Entretien avec M. Raimondo), «Il Dramma», 1, octobre 1968, où il donne libre cours aux sentiments et esquisse ses projets.

[27] C. Longhi, Marisa Fabbri, cit., p.  174. Sur sa démission, présentée le 20 juillet 1968, cfr. R. Radice, Strehler ha lasciato il Piccolo Teatro, «Corriere della sera», 22 juillet 1968. G. Strehler réfléchit sur sa position dans cette période dans Considerazioni di G. S. al documento del 1964, dactilo de 1991, cit. dans C. Longhi, Marisa Fabbri, cit., p. 175 ; dans G. Strehler, Io, Strehler, cit. et aussi dans Entretien avec Tullio Kezich, «Sipario», 268-269, août-septembre 1968.

[28] S.a., «L’Unità», 3 août 1968.

[29] Cfr. Longhi, Marisa Fabbri, cit., p. 199. La comédienne Marisa Fabbri était parmi les opposants de la démarche de Strehler en leader du Gruppo Teatro e Azione: cfr. sa Lettre de démission, dans C. Longhi, Marisa Fabbri, cit., p. 210.

[30] Cfr. I Teatri Stabili. Atti del convegno di studi (ottobre 19656), Firenze, s.e., 1965; Per un nuovo corso del teatro italiano. Atti del convegno di studi, Firenze, s.e., 1968; et L’intervento pubblico nel teatro di prosa. Atti del convegno dell’Associazione Nazionale Critici di Teatro (février 1972), Roma, s.e., 1972, où les notions de «service public» et de «théâtre populaire» sont notamment mises en question.

[31] A. Attisani, Teatro popolare?, «Scena», 1, janvier-février 1976, pp. 3-4.

[32] B. Dort, Teatro Pubblico, Padova, Marsilio, p. 291 et S. Ferrone, Le Piccolo Teatro di Milano: “communauté” et “bottega”, dans G. Banu (direct. de), Les Cités du Théâtre d'Art, Paris, Théâtrales, 2000, p. 275. On lit la préference de Strehler pour le «théâtre d’élite pour tous», selon Vitez, par rapport au théâtre de masse, dans G. Strehler, Io Strehler, cit., p. 196. 

[33] J. Vilar, Rapport général aux comédiens (1960), «Esprit», mai 1965.

[34] S. Ferrone, Le Piccolo Teatro di Milano, cit., p. 277.

[35] Cfr. C. Steinegger, Pierre Boulez et le théâtre, Wavre, Mardaga, 2012, pp. 189-225.

[36] G. Strehler, Per un teatro umano, Milano, Feltrinelli, 1974, p. 137.

[37] Cfr. G. Strehler, Lettere sul teatro, cit., p. 116 et cfr. P. Wehle, Le théâtre populaire selon Jean Vilar, Arles, Actes Sud, 1991, p. 125.

[38] Cfr. Actes du Colloque Théâtre de Masse, Avignon, octobre 2009; Cfr. L. Leonesi, Calorosi gli applausi…, Milano, Vangelista, 1986 et Cinque modi per conoscere il Teatro (direction V. Gassman et L. Lucignani), Roma, Edindustria editoriale, 1962.

[39] Cfr. G. Strehler, Un Théâtre pour l’Europe, «Le Figaro», 6 octobre 1982; Le théâtre dans la perspective d’une Europe unie, communication au Colloque De l’Art à l’heure de l’Europe, Strasbourg, 30 novembre 1993, dans Les Pouvoir du Théâtre (soin de J.-P. Sarrazac), Paris, Éd. Théâtrales, 1994, pp. 49-55.


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