Fausto Paravidino, jeune auteur italien dont trois pièces ont été traduites en français à ce jour [1], propose dans ses textes une approche percutante de lactualité en fustigeant notamment le libéralisme à tout crin. Voici la traduction dun entretien que Fausto Paravidino a accordé à un site théâtral italien, dans lequel il retrace son parcours de création et où transparaît son regard acerbe sur la société contemporaine occidentale.
Comment la pièce Peanuts est-elle née ?
Le National Theatre ma passé une commande en décembre 2000. Il était question décrire une pièce adressée au jeune public, dans le cadre dun projet qui sappelle "International Connections", une initiative intéressante qui fait chaque année des commandes décriture de textes pour les écoles à une dizaine décrivains, pas forcément des anglais, sans aucune contrainte particulière. A cette époque je travaillais sur la pièce Nature morte dans un fossé, mais, après les événements du G8, je sentais que ce que javais écrit était inadéquat à ce qui était en train de se passer. Jai tout balancé, jai demandé une prolongation et jai recommencé. Javais limpression quil était nécessaire de ne pas perdre loccasion de faire connaître à létranger ce qui sétait passé en Italie.
Tu étais à Gênes pendant le G8 ?
Non, jétais à Paris, et le premier jour du G8 jétais à Londres, au Royal Court, où, en discutant avec un metteur en scène auquel je rendais visite, je disais quà Gênes il allait y avoir un gros bordel. Il nétait pas difficile de le prévoir, vu comment les choses avaient été mises en place : la ville militairement occupée par les forces de lordre, les huit chefs dEtat enfermés comme dans une forteresse assiégée, des barricades partout qui encerclaient le centre dune ville fantôme, et enfin le bruit des hélicoptères en permanence au-dessus des têtes… Javais plein de copains à Gênes et jétais en contact avec eux pour savoir comment les choses se passaient. Les événements de Gênes ont eu une grande couverture médiatique qui a produit beaucoup de matériaux filmés. Des nouveaux paraissent encore maintenant. Heureusement, car à défaut de toute cette documentation vidéo, le mécanisme de la répression du pouvoir aurait été encore plus dangereux. En plus de la répression physique, il y aurait eu la répression médiatique.
Peanuts, messa in scena di Stanislas Nordey
Cest vrai. Une section entière de la cinquième édition du Genova Film Festival est consacrée cette année aux films du G8. Peanuts voulait donc être une pièce de contre-information.
Peanuts est née de lurgence de témoigner. Je lisais dans le livre Non lavate questo sangue (Ne lavez pas ce sang) de Concita de Gregorio, la journaliste de La Repubblica, la préoccupation dun médecin des urgences de Gênes qui craignait quon ne le croie pas. Cest le syndrome de Primo Levi, qui, au retour de Auschwitz avait un cauchemar récurrent : il racontait, mais on ne le croyait pas. Cela se produit lorsque lhorreur est tellement démesurée quon craint de ne pas trouver doreilles disponibles pour lécouter. Peanuts a été pensée pour un public international, même si, avant même dêtre écrite, la pièce avait été choisie par le metteur en scène Sergio Maifredi du Théâtre de la Tosse de Gênes. Le langage a été le premier problème pour moi. Comment parler à des gamins anglais ? Quand javais été en Grande-Bretagne pour travailler à la pièce Malattia della famiglia M, javais découvert quil y avait des différences culturelles auxquelles je naurais jamais pensé. Par exemple, pour le traducteur anglais il est très important de savoir quelle est la classe sociale des enfants auxquels je madresse, car les écoles anglaises sont divisées par classes sociales. Chose qui, en Italie, où les écoles pour linstant sont pour la plupart publiques, nest pas aussi claire. Je ne voulais ni faire une opération de tourisme culturel, lauteur italien qui vous montre comment lItalie est faite, ni de lautre coté, me déguiser en écrivain britannique. Et puis loccasion de faire parler des jeunes avec dautres jeunes était trop savoureuse. Et cest là que la globalisation intervient. Jai cherché un modèle de dialogue commun aux deux, moi et eux, et jai pensé à la bande dessinée, au langage universel des Peanuts, qui sont comme du Beckett, mais en bande dessinée. Les Peanuts de Schultz sont absolument beckettiens, sauf que, au contraire de Beckett, ils sont populaires. Jai donc emprunté les personnages de Schultz, je les ai vieillis et je les ai balancés à la caserne de Bolzaneto, où les jeunes, arrêtés par la police qui avait fait irruption dans lécole Diaz, furent soumis à des menaces et à des violences de tout genre.
Quelle est la correspondance entre les personnages de Peanuts et les personnages de la bande dessinée ?
Dans la première version, les noms des personnages étaient les mêmes que ceux de la bande dessinée dont ils étaient inspirés. Ensuite, pour des raisons de droits dauteur, on a préféré les déformer, même si certains restent très reconnaissables. Le nom de Charlie Brown est devenu, comme Buddy, un nom commun comme par exemple « Mario Rossi » en Italie ou « Franz Schmidt » en Allemagne. Minus est Linus, Schroeder est devenu Schkreker, dautres sont encore plus transparents, comme Snoopy qui est devenu Snappy ou Sally qui est Silly ou encore Woodstock-Woodschlock, alors que Lucy est devenue Magda.
Y a-t-il une correspondance psychologique entre chaque personnage de Schultz et chaque personnage de la pièce ?
Jai essayé de maintenir une adéquation avec le personnage original et dans certains cas jai réussi, comme pour Charlie Brown, Sally et Lucy. Avec dautres jai moins réussi : certains personnages de Schultz ont une psychologie quon peut retrouver chez les adultes, alors que dautres restent confinés à lenfance. Par exemple, il y a de nombreux Charlie Brown adultes dans le monde. Et puis il y a les animaux, par exemple le fait que Snoopy soit un chien a été traduit dans le caractère anarchiste de Snappy, alors que Woodstock se prêtait à toute sorte dopérations dramaturgiques à partir du moment où dans la version originale il sexprime par petits traits et que personnellement je nai jamais compris ce quil avait à dire. Aussi souvent que possible jai tenté de garder les rapports damitié et les liens de famille, comme pour Charlie Brown et sa sœur Sally.
Peanuts, messa in scena di Stanislas Nordey
Je me souviens avoir lu quelque part quà lorigine de Peanuts il y a la constatation que Carlo Giuliani et Mario Placanica, le carabinier qui lui a tiré dessus, avaient le même âge.
Cest une chose qui ma frappé. Nous sommes bien loin de Pasolini et de ses prolétaires en uniforme de policier. Alors que le jeune assassiné écrivait des poèmes en latin, Placanica, le meurtrier, interviewé à la télé, ne sait même pas aligner six mots daffilée et cest impressionnant de savoir que cest lEtat qui lui a mis une arme à la main. La tendance actuelle me paraît celle de recréer un monde de classes, et en plus, les pouvoirs de droite attaquent létat social. Jai limpression que cest celle-là, la droite qui savance : une droite pas tellement caractérisée par ses choix autoritaires plus ou moins fascistes, mais par son soutien à une société basée sur le pouvoir de largent, une société où cest la loi du plus riche qui domine, et tant pis pour ceux qui nont pas réussi. La vieille Démocratie Chrétienne avait tant bien que mal transformé les italiens en une grande classe moyenne, et là est la vraie question de cette pièce. Cest sur la base de ce processus dhomologation, culturelle et autre, que, à Gênes, ceux qui défonçaient les têtes avec les matraques et les jeunes qui manifestaient, avaient les mêmes chansons en commun. Ce nest pas un hasard si les musiques de Fabrizio de Andrè, chanteur anarchiste par excellence, étaient diffusées par les enceintes du Palais des sports, transformé, à loccasion du G8, en une grande caserne.
Quelle est la fonction des titres des différentes sections ?
Dans leur ensemble, ils constituent une sorte de bréviaire des thèmes de la globalisation. Il fut un temps où on disait que la sphère personnelle est aussi politique. Les sections de la pièce représentent une tentative de mesurer dans la vie de tous les jours les grands thèmes de la politique, et elles en sont aussi une sorte de contre-chant ironique, sans jamais tomber dans la parodie. En général, le même concept exprimé de manière infantile dans le premier acte, revient dans le deuxième sous sa forme adulte. Mais, alors que dans le premier acte des situations très banales et à « mesure de gamins » correspondent à des titres tirés des grands thèmes de lHistoire et de la politique, dans le deuxième jai attribué des titres inadéquats et sentimentaux à des scènes qui racontent un monde adulte aux traits inquiétants. A cause de leur minimalisme, les titres du deuxième acte ne correspondent pas du tout à la gravité de la situation quon raconte, et sont une sorte de message rhétorique et rassurant, dicté par un ordre établi, uniquement occupé à minimiser.
Prenons des exemples. Au début, la présentation de Buddy paraît sous le titre de « Politiques du Travail ».
Buddy fait un travail desclave et lorsque les autres le lui reprochent, il répond par un exercice de rhétorique qui vise à masquer la réalité des faits, tout dabord à lui-même et ensuite aux autres. Cest la barbarisation en cours actuellement dans le monde du travail globalisé. Il y a eu récemment en Italie, mais peut-être aussi ailleurs, une campagne de recrutement de Mc Donald, un exemple très clair pour expliquer le sens du travail intérimaire. Les affiches montraient des visages souriants de jeunes employés et en dessous de chacun on lisait « futur avocat, futur ingénieur », etc… ce qui voudrait dire que Mc Donald ne vous promet aucun avenir, et dailleurs qui voudrait dun avenir chez Mc Donald ? Ce qui nest pas dit cest que Mc Donald propose une paie minable et un contrat de six mois, et je doute fortement quaprès une journée de travail chez Mc Do, on ait suffisamment dénergie pour mener à bien des études davocat ou dingénieur.
Un autre exemple : « Les médias contrôlent le monde. Permis de séjour ».
Je ne pense pas vraiment au Big Brother dOrwell, mais plutôt au fait que lEmpire envoie de par le monde ses armées, mais que tout dabord il transporte ses produits par la plate-forme médiatique. Dabord le cinéma, ensuite la CNN et enfin le Coca-Cola. Le résultat est lhomologation du journal télé et le fait que chacun de nous a limpression de vivre dans la banlieue de New York. Mais lexception existe aussi, et cest pour cela quil existe encore des compartiments de résistance étonnants.
Continuons : « Schengen libre circulation dhomme et de marchandises ».
Jai été très frappé par linterruption du traité de Schengen pendant le G8 de Gênes, et que cela soit accepté sans trop de protestation des gouvernements européens. Cest lun des paradoxes du monde globalisé : les marchandises circulent, parfois on paie même les taxes dessus, les capitaux circulent encore plus aisément, mais pas les gens. La frontière se situe pour Silly à la porte de la maison que Buddy doit surveiller ; pour y faire entrer ses copains, elle essaie de le convaincre avec largument quils apporteront des choses : comme sil fallait les accepter non pas pour ce quils sont mais pour les biens matériels quils apportent. Voilà, les camionneurs qui transportent des marchandises peuvent circuler librement.
« Les idéaux là et tout de suite ».
Le thème est incarné par Magda, qui fait des études dingénieur seulement pour suivre le désir de ses parents et qui calcule la date probable de leur mort afin dacquérir sa liberté. Cest lécart avec ce raisonnement tordu selon lequel dans lattente dun avenir meilleur, la réalpolitik suggère daccepter un présent basé sur le compromis. Sauf quaprès on saperçoit que ce que lon pensait être transitoire se révèle définitif et que la vie est passée dans lattente dune occasion qui ne sest pas présentée.
« Révolution et nouvelles techniques de lutte politique ».
Cest évidemment un dialogue parodique entre deux personnages, lun intégré et lautre animé par un élan révolutionnaire indistinct, dominé par limpulsion de tout fracasser, sans un dessin politique précis. Cest peut-être le moment le plus triste de toute la pièce. Cest limage des émeutes de Los Angeles, de la révolution argentine, où la population est descendue dans la rue pour manifester, en frappant des cuillères sur des marmites vides, mais personne navait dans la tête une véritable alternative politique.
Genes 01, messa in scena di Stanislas Nordey
Quel est le sens de la politique pour ta génération ?
Je précise que je nai pas envie de parler au nom de ma génération, entre autre parce que je crains que mes copains et moi nen soyons quun échantillon statistiquement peu représentatif. Je crois quil y a actuellement un véritable problème de représentation. Beaucoup de citoyens, et pas seulement ceux de ma génération, ne se sentent plus représentés par la politique traditionnelle et aujourdhui, les mouvements contre la globalisation recherchent dautres lieux et dautres manières de faire de la politique. Les associations de volontariat sont souvent la réponse à cette envie retrouvée de faire de la politique. Mais ce quon ressent est le manque dun projet. Même lâme verte et écologiste de lEurope ne bouge quà lintérieur des catégories économiques propres à léconomie de lexploitation. Au fond, lEurope ne se différencie des Etats-Unis que par sa timidité, par moins darrogance, par un reste de culpabilité, dû, peut-être, à son passé colonialiste. Mais on nen est pas encore à une inversion de la tendance capitaliste, celle qui mesure les paramètres de Maastricht en terme de croissance du PIB (produit intérieur brut), alors que lobjectif de léconomie mondiale devrait être la réduction du PIB. Je comprends que la crise du marché de lautomobile engendre le chômage, mais en arriver à souhaiter lexpansion perpétuelle du marché de lautomobile nous amènera tout droit à la catastrophe, et pas uniquement à la catastrophe de lenvironnement. Je nai pas de recettes, je constate seulement le manque dune idée politique alternative.
Doù vient ton lien avec le théâtre anglais et comment as-tu été invité par le Royal Court ?
Après, javais écrit Due fratelli qui avait emporté le Prix Riccione 1999. Les gens du Royal Court lont lu et mont demandé de leur envoyer les autres pièces, ensuite ils mont contacté. Je suis arrivé à Londres avec une semaine davance pour essayer de prendre de laisance avec la langue et cest là-bas que jai terminé La malattia della famiglia M. Le stage durait un mois et daprès ses objectifs, on devait faire aboutir un travail en chantier, participer à des séminaires décriture, et à des rencontres avec des metteurs en scène et des auteurs reconnus, comme Harold Pinter et David Hare. Mais la chose la plus stimulante était la rencontre avec les autres stagiaires, une vingtaine, venus de tous les pays du monde. Ce nétait pas un cours décriture, mais un échange culturel, même pour les auteurs du Royal Court qui venaient nous voir.
Genes 01, messa in scena di Stanislas Nordey
Comment Gênes 01, la pièce commandée et ensuite représentée au Royal Court, est-elle née ?
Jétais en contact avec le Royal Court depuis le stage, et la commande ma été faite dans le cadre dune initiative conjointe entre le Royal Court et lassociation Human Rights Watch, une sorte dAmnesty International qui, à cause des violences du G8, avait inscrit lItalie dans la liste des six pays du monde où il y avait violation des droits de lhomme. Ils ont donc passé une commande décriture à un écrivain pour chacun des six pays en question. Gênes 01 est née comme ça, cest une pièce qui vient après Peanuts et qui retrace les jours du G8 sur le style sec du théâtre-documentaire, tel un reportage journalistique.
Tes pièces sont très différentes les unes des autres, Nature morte dans un fossé, par exemple, appartient au genre noir.
Je fais des tentatives. Je ne midentifie pas à un genre en particulier, je cherche à changer, pour voir où je réussis le mieux et aussi pour me donner des contraintes. Se donner des contraintes aide limaginaire.
Qui sont tes maîtres ?
Comme acteur jai beaucoup étudié le cinéma et en particulier la « comédie à litalienne », comme auteur si je pense à une comédie, je pense à Eduardo de Filippo. Mais pour moi lauteur de la dernière grande révolution linguistique au théâtre est Harold Pinter, avec sa capacité à isoler le caractère absurde de notre présent quotidien, ce qui a amené la critique à croire que cétait un auteur du théâtre de labsurde. Jaime beaucoup aussi Jon Fosse, dramaturge norvégien qui a une écriture très elliptique, absurde en apparence, mais, si tu regardes bien, tu taperçois que chaque chose est en réalité le vecteur dune pensée. Sauf que, à la différence de Pinter, dans ses pièces il ne se passe vraiment rien, on ne peut pas dire quil y ait une histoire, mais au fur et à mesure, il tamène quelque part, dans une atmosphère qui fait quà la fin tu comprends tout. Je lai lu en français et en anglais, cest facile car il utilise en tout trois cents mots, comme dans les bandes dessinées. Cela ne fait pas très longtemps que je reçois des pièces à lire : en Italie lédition théâtrale nest pas très répandue, mais, heureusement, il les gens du milieu séchangent des pièces. Et puis il y a Sarah Kane qui a un sens religieux de la tragédie de la vie : cest une écrivaine très puissante, mais elle ne pourra jamais être le modèle à imiter pour moi.
Comment as-tu rencontré le théâtre ?
Au lycée jai fait du théâtre avec les copains, puis jai été reçu à lécole nationale du Théâtre de Gênes, et très vite jai rejoint les élèves de la deuxième année qui voulaient fonder une compagnie. Javais rencontré Lello Arena, comédien qui a joué avec Massimo Troisi, et il sest proposé comme metteur en scène. La présence de Nicola Piovani et de Vincenzo Cerami, le musicien et le scénariste de La vie est belle (de Benigni), assurait une tournée conséquente : comment ne pas croire à deux Oscar ? On a eu limpression davoir gagné le gros lot. On navait rien dit à lécole, mais deux fois par semaine on répétait à Milan Le Songe dune nuit dété : on se réveillait à six heures pour aller à Milan, on répétait et on revenait à lécole à deux heures de laprès-midi. Cela faisait un mois quon avait commencé, un jour il y a eu un embouteillage sur lautoroute, on est arrivé tous en retard et on a dû passer aux aveux. Lannée terminée, on sest tous revus à Rome pour mettre en scène le spectacle. Quelques mois après on était encore là-bas, la tournée était tombée à leau, lécole de théâtre avait recommencé sans nous, on était tous au chômage à Rome, sans avoir la moindre idée de ce quil fallait faire : retourner à Gênes voulait dire avouer notre échec.
La pièce Gabriele sest nourrie de cette expérience ?
Javais été convoqué dans le nord pour faire mon service civil parmi les ambulanciers à Alessandria, une région de brouillard et dautoroutes, et jen ai vu de toutes les couleurs cette année-là dans les ambulances, jai vu toute la dramaturgie de la terre. Dès que je pouvais, je retournais à Rome pour voir mes amis, le temps passait et rien ne se produisait. Une fois lannée terminée, je suis retourné vivre à Rome. Le groupe sétait dispersé, mais moi je croyais toujours que huit futurs acteurs enfermés dans un appart pendant un certain temps pourraient produire quelque chose. Cest comme ça que Gabriele est né, écrit à quatre mains avec Giampiero Rappa. Lhistoire de jeunes aspirants comédiens dans un appartement à Rome et de leur crise.
Aujourdhui tu bouges entre Rome, où tu vis, Londres et Paris… mais tu as passé la plupart de ta vie à Rocca Grimalda, où tes parents habitent toujours, un petit village typique de 1310 habitants, qui domine une vallée où on produit du bon vin et où, depuis quelques année il existe un Laboratoire Ethno-anthropologique très actif, qui organise chaque année des colloques internationaux très intéressants. Tout cela donne lidée dune vie bien tranquille, et en même temps une vie monotone pour un jeune.
Rocca Grimalda reste un de mes sujets préférés, un sujet sur lequel il y a toujours des choses à écrire car je pense quon ne la pas suffisamment raconté : on a raconté un village et une campagne qui nexistent plus, mais pas cette étrange cohabitation entre les étables avec leurs vaches, les cours avec les poules et les modèles esthétiques de la ville, médiatisés par les pubs de la télé. Aujourdhui Rocca Grimalda est un lieu qui a perdu ses références culturelles. Jaime appeler Rocca Grimalda et toute la région Ovadese « la périphérie de New York », car les jeunes ne sidentifient pas à la campagne, mais ils se sentent culturellement à la périphérie de New York, cest le modèle que les médias leur transmettent et dont leur façon de shabiller témoigne. Le village comme noyau de gens qui se connaissent et qui se fréquentent existe toujours, mais en réalité il a explosé avec larrivée de la voiture, et les liens damitié se sont distendus comme à Rome par exemple. Quand je reviens dans le nord pour aller voir des amis je me tape en moyenne 120 km par jour. Là il y a une jeunesse qui voyage, voyage, voyage… Pour un jeune, le monde change radicalement lorsquil a 18 ans, quil a son permis de conduire et quil entre dans le monde des adultes, lorsquil peut prendre la voiture et se taper des kilomètres et des kilomètres pour arriver à vivre sa périphérie de New York.
Quel est le sens du théâtre pour toi ?
Cest un moyen pour communiquer, cest une occasion pour partager les joies et les douleurs, les pensées et les émotions dans un lieu public.
[1] Deux de ses pièces ont été créées en France par Stanislas Nordey : Gênes 01 et Peanuts, au festival Mettre en scène, Rennes, du 6 au 19 novembre 2006 et à Théâtre Ouvert, Paris, 4 au 16 décembre 2006.
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